Avant de rentrer dans le vif du sujet, il me semble important de replacer la définition de la santé sexuelle de l’OMS :
Il s’agit d’un bien-être physique, mental et social dans le domaine de la sexualité.
Elle requiert une approche positive et respectueuse de la sexualité, des relations sexuelles. Il s’agit de pouvoir vivre des expériences sexuelles avec plaisir, sans risque, et libre de toute coercition, discrimination ou violence ( OMS, 1975 et 2002).
Il est également essentiel de comprendre que la sexualité féminine ne fonctionne pas en miroir de la sexualité masculine. La réponse sexuelle des femmes est beaucoup plus globale et entremêlée entre sa tête, son corps et son cœur.
Après un accouchement, ces trois sphères se retrouvent chamboulée et ont besoin de temps pour se ré-équilibrer. La dynamique sexuelle d’une femme devenue mère est influencée par l'impact physique et le vécu de son accouchement, qui peuvent être différents pour chaque enfant, son lien avec son bébé et par la qualité de la relation de couple avant et après la grossesse.
Evidemment les jeunes pères peuvent aussi avoir une répercussion de la grossesse, de l'accouchement ou de cette nouvelle paternité sur leur sexualité.
Dans tous les cas, on observe une diminution des activités sexuelles après l’arrivée d’un bébé ( Olsson & Co, 2005 ; Wyder, 2007 ; Pastore&Co, 2007).
Les recherches indiquent même que durant la première année de l’enfant, il y a une augmentation des conflits relationnels et sexuels qui peuvent affecter le bien-être du couple.
Il est donc important de réaliser que l’intimité est touchée chez la toute grande majorité des nouveaux couples parentaux.
Cette espace le plus intime va avoir besoin de temps et d’ajustements pour que les deux partenaires puisent se retrouver de manière satisfaisante ( Serati & Co, 2010).
C’est comme une REINVENTION dans l'INTIME du Soi Féminin devenue maman, du Soi Masculin devenu papa et du Nous devenus parents.
Il est certain que le plus grand changement et les plus grandes inquiétudes touchent ce premier passage à la parentalité. Nous retrouvons une surabondance de recherches sur les modifications corporelles, la reprise des relations sexuelles, la douleur à la pénétration, l’absence de lubrification vaginale, les questions de désir sexuel, … sur les réseaux sociaux.
En fait, les mots clefs « sexualité, post-partum » suscitent 3.820.000 citations sur google (Mayenga, 2010). Vous voyez, vous n’êtes pas seul.e à vous poser des questions.
Et puis il y a une culpabilité spécifique aux femmes quant à devoir répondre aux désirs, aux envies du partenaire comme si la femme portait la responsabilité du bien-être sexuel du couple. (cf livre La charge sexuelle de Clémentine Gallot et Caroline Michel).
A 4 mois après l’accouchement, les plus fortes inquiétudes concerne le retour à la pénétration, la contraception mais aussi spécifiquement pour les femmes, leur perception d’être devenue moins désirée et désirante, ce qui impacte directement leur envie de la reprise de la sexualité et de la pérenniser.
Osez demander à vos partenaires de vous rassurer, car en réalité, les changements de votre corps impactent bien peu leur désir (Mc Adam & Co, 2011).
A 6 mois, les choses commencent à s’améliorer. La sexualité reprend plus de place dans le coupe, même si la fréquente est moindre qu'avant la grossesse ( Trutnovsky & Co, 2006).
A 12 mois après l’accouchement, une sexualité plaisante pour le deux partenaires semblent reprendre sa place même si une certaine discordance des désirs sexuels persiste dans le couple ( Pastore L & Co, 2007).
Quel que soit le rythme de vos retrouvailles intimes, aucune peur, douleur ou crainte en lien avec la sexualité ne doit être normalisée.
Osez en parler avec les professionnels de la santé périnatale. Ils pourront vous aider ou vous aiguiller vers des spécialistes, si nécessaire.
Evidemment, des impacts comme la dépression, des incontinences urinaires ou fécales, des douleurs chroniques, des brûlures périnéales et/ou vaginales persistantes pendant ou après la pénétration sont à nommer le plus tôt possible auprès de votre sage-femme ou médecin car il ne s’agit pas d’une fatalité.
Même si certaines douleurs ou gênes sont transitoires, des moyens pour soulager existent.
Se réapproprier son corps qui a subi des modifications certaines lors d’une grossesse et d’un accouchement par voie basse, ou par césarienne par ailleurs, demande du temps.
Le.a partenaire peut aussi avoir des peurs, des blocages après un accouchement, voire même pendant la grossesse, qui impactent la sexualité du couple. La première démarche est d’en parler ensemble sans accusation. Juste ouvrir un espace où chacun exprime ce qu’il/elle ressent, ses besoins, ses craintes.
On peut également observé que certaines femmes se sentent tellement comblée par leur bébé dans les premiers mois qu’elle n’éprouve pas l’envie de retrouver les bras de leur partenaire.
Si c’est votre cas, il est intéressant dès lors de s’interroger sur trois éléments de votre vie :
- Quel est l’investissement de votre partenaire dans ce nouvel équilibre familial ?
On réalise que la qualité de l‘investissement du partenaire dans un nouvel équilibre respectueux de chaque parent influence la dynamique sexuelle de la jeune maman.
- Quelle était la qualité de vos relations avec votre partenaire avant et pendant la grossesse ? L’arrivée d’un bébé peut mettre en lumière des conflits non résolus au sein du couple en son temps.
- Ai-je subi de la violence précédemment dans ma vie ?
De la violence subie avant ce partenaire ou avec ce partenaire peut ressurgir au moment du passage à la parentalité et se figer dans l’expression sexuelle du couple au présent.
En cas d’histoires lourdes, ne restez pas seul.e. avec cela.
Il est donc important de retenir qu'un grand nombre de couples traversent des difficultés dans leur vie sexuelle après l’arrivée d’un bébé.
Un réajustement dans la vie intime des couples devenus jeunes parents est incontournable pour la toute grande majorité.
Ne croyez pas les magazines et les youtubeuses qui cherchent juste à vanter une culture érotisée des corps féminins et idéaliser la relation parentale.
Si la pénétration est compliquée, rien n'est à forcer. Cela n'empêche pas de se caresser, de se faire du bien et de se retrouver dans un peau à peau sensuel.
Par contre, la douleur physique ou psychique ne doit pas faire partie d’un bien-être intime.
Si une difficulté perdure ou vous semble insoutenable même très vite après votre accouchement, n’hésitez pas à consulter.
Ecoutez-vous, laissez-vous guider par votre petite voix intérieure et oser demander de l’aide.
La santé sexuelle post-natale se doit d’être une source de plaisir en toute sécurité, sans violence, coercition ou discrimination, qui s’inscrit dans une nouvelle histoire positive du couple.
Prenez Soin de Vous,
Cendrine Vanderhoeven,
Sexologue, Formatrice et Conférencière.
Oeuvre de Bénédicte Philippe, Belgium
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